Mi-saison 2024 : questionnements et avenir flou

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L’optimisme de la saison morte, transformé en euphorie après un début de saison sur les chapeaux de roue, elle-même métamorphosée en profonde dépression après une série de résultats décevants et un autre épisode de télénovela dont seule la franchise montréalaise a le secret : le CF Montréal nous aura servi la totalité du spectre des émotions vécues depuis son entrée en MLS en l’espace de quelques semaines seulement. Jamais un bilan de mi-saison n’aura été aussi nécessaire, car les supporters pataugent entre désespoir complet et profonde désorientation. Fondamentalement, le CF Montréal est là où il devait se trouver, oscillant entre bon et moins bon, parfois très bon et très mauvais, toujours à quelques encablures d’un billet pour accéder aux séries, mais aussi résolument trop proche de la dernière position. Des montagnes russes et un bilan.

Mathieu Lemée (@matlemee)
Est-ce que l’effectif du CF Montréal est si pauvre en talent et techniquement que certaines personnes disent?

S’il y a une chose que j’ai apprise depuis toutes ces années à suivre de près l’Impact de Montréal, c’est que ses supporters et autres admira-détracteurs ne font pas dans la dentelle quand vient le temps de juger les performances de l’équipe et la qualité des joueurs qui la composent. À Montréal, il suffit qu’un joueur rate une passe clé pour qu’on oublie instantanément les cinq autres passes clés consécutives réussies par ce même joueur dans le même match. Inversement, si un joueur réussit deux débordements spectaculaires de suite, on oublie illico et pour longtemps les 12 matchs inutiles livrés par ce joueur tout juste avant. Pareil pour les performances collectives : si on arrache un point sur la route à une équipe de milieu de tableau plombée par les blessures, on va probablement gagner la coupe. Par contre, on échappe en fin de match un match nul chez le champion en titre qui compte sur tous ses titulaires et vient de gagner six matchs consécutifs, et notre équipe ne vaut pas un clou. Inutile de dire que dans un tel contexte, « ce que certaines personnes disent » ne devrait pas nous empêcher de faire notre propre évaluation du spectacle. Et donc, la réponse est non : cette équipe ne sera jamais aussi mauvaise ni aussi bonne que ce que « certaines personnes » prétendent. Dans les faits, Montréal est une équipe de milieu de tableau, qui peut embêter un peu tout le monde dans la ligue, comme elle peut aussi flancher contre des adversaires prenables. Le groupe est bon, meilleur que l’an dernier, mais on ne sait trop de quoi sera fait l’avenir au nveau de la direction sportive, donc, inutile de s’attarder, les choses vont changer, sans aucun doute.

Julien Tardif (@tardifju)
À quel point on est dans le trouble au poste de gardien?

Mais voulez-vous bien me dire comment on en est arrivés à se poser cette question? Ah oui, Jonathan Sirois a connu quelques ratés cette saison, puis a manqué deux passes en relance dans le même match. Voir la réponse à la première question : on a oublié ce qu’il a fait de bien en se focalisant sur ce qu’il a fait de mal. Jonathan Sirois, ne l’oublions surtout pas, en est à sa seconde saison en MLS, la première s’étant plutôt bien déroulée. Il fallait, et je l’avais répété quelques fois l’année dernière, qu’il confirme. On ne peut évidemment pas prétendre qu’il est parmi les meilleurs gardiens de la ligue cette saison. On ne peut pas non plus dire qu’il est aussi bon qu’en 2023. Cela dit, on ne peut pas non plus prétendre qu’il rate sa saison. Sirois fait une saison honnête, avec des hauts et des bas, et s’il ne confirme pas entièrement les dispositions affichées la saison dernière, on peut toutefois affirmer sans se tromper qu’il se présente désormais comme un gardien correct de MLS. Et vous savez quoi? Je pense que c’est ce à quoi on devait s’attendre de lui, du moins cette saison. Après, on verra si l’expérience amènera la confiance, et si cette confiance ramènera la constance à laquelle il nous avait habitués l’an dernier. Il en est capable, il l’a déjà fait. Rien n’indique que Sirois ne pourra pas revenir à son meilleur en 2025, voire en 2024. Et quand il reviendra dans le giron de l’équipe nationale, qui sait? Peut-être passera-t-il un cap? On peut très bien progresser sans nécessairement attirer un transfert lucratif vers l’Europe. Parlez-en à Maxime Crépeau.

Ouellette Normand (@1grandbleu)
Est-ce qu’il est déjà trop tard pour nommer un directeur sportif, qui pourra être efficace lors du prochain mercato (été)? Si, oui quel message cela envoie-t-il à l’effectif actuel?

Voyons voir. Le travail de préparation pour renforcer l’équipe au prochain mercato devrait être en cours depuis quelques semaines déjà. En fait, le mercato, c’est… maintenant. Et où en est-on dans la réorganisation structurelle du secteur sportif? Nul ne le sait, puisqu’à part le départ attendu des alliés d’Olivier Renard, rien n’a été communiqué quant à la possible arrivée d’un as des règles MLS ni sur le travail de réflexion effectué par Gabriel Gervais. Alors, est-il déjà trop tard? Oui, un peu. Enfin, il n’est pas impossible qu’on nomme quelqu’un rapidement, une personne qui connaît déjà tellement bien la ligue qu’elle pourrait potentiellement arriver ici avec quelques cibles intra-MLS pour améliorer l’effectif. Voire avec des négociations déjà entamées. Dans le cas contraire, si personne ne se pointe d’ici, disons, le premier juillet, comment les joueurs vont-ils recevoir la nouvelle? Ceux qui voudront partir craindront de rester coincés ici de peur que personne ne soit en mesure de négocier une sortie. Pour les autres, eh bien, ce sera business as usual; on prend les mêmes et on recommence.

Meroy (@Meroy22)
Maintenant que Renard est parti, est-ce envisageable de voir un changement à la formation 3-5-2 imposée ou il serait préférable de continuer avec la même structure dans le futur?

Tout est envisageable. Par contre, il serait somme toute surprenant de voir un entraîneur habitué à jouer dans ce schéma, équipé d’un effectif bâti pour jouer dans ce schéma et ayant répété depuis janvier ses gammes avec ce schéma subitement passer en 4-1-3-2 ou je ne sais quoi d’autre au gré de ses humeurs. Maintenant, pour 2025, là, c’est ouvert aux adaptations. L’arrivée éventuelle d’un nouveau directeur sportif suppose qu’une profonde discussion sur les avenues à emprunter aura lieu avec le président puis avec l’entraîneur. Or, il ne faut pas non plus oublier que l’entraîneur et les joueurs qui sont là ne sont pas les hommes qui ont été choisis par le futur directeur technique. Si les résultats ne s’améliorent pas radicalement, l’idée de faire table rase pourrait facilement être adoptée au conseil. Personne n’est à l’abri. Sauf évidemment si les succès s’enchaînent et que les joueurs et l’entraîneur démontrent leurs qualités. C’est la seule façon pour ce groupe de mettre les chances de son côté. Parce que pour le moment, sans que ce soit catastrophique, disons que personne n’est ébloui par ce que Montréal montre sur le terrain.

JF Rousseau (@JFRousseau55)
Le retour des nombreux blessés sera-t-il suffisant pour redresser la barque et atteindre les séries? Bonus : quelle est ta surprise de la saison?

Si par les nombreux blessés on entend Opoku, Martinez et Coccaro, alors oui, ça devrait normalement être suffisant. On a vu leur apport avant leurs malheureuses blessures. Puisque Montréal avait l’air d’une équipe fort capable de composter son billet pour les séries avant leur disparition, il n’y a absolument aucune raison de croire que ce ne sera plus le cas quand ils reviendront. Maintenant, le bilan comptable est tout de même faible. Montréal traîne à sept points de la septième place, laquelle devrait être la réelle cible pour tout club dont les ambitions sportives se limitent à participer (aux séries). Et fondamentalement, l’Impact n’est pas très loin du fond du baril, lequel pourrait être atteint si Montréal ne parvient pas à se faire respecter d’ici la Leagues Cup, car la séquence de matchs d’ici là s’annonce somme toute difficile. Donc, le mal est-il fait ou les trois nommés ci-haut sauront-ils à la fois renforcer l’équipe et rester en santé? L’heure n’est pas encore à jeter la serviette, en tout cas.

Ma surprise de la saison? La stagnation, pour ne pas dire le recul, de Mathieu Choinière. C’est une mauvaise surprise, mais comme on n’a pas indiqué que la surprise devait être bonne, j’y vais avec la première chose qui me frappe en repensant à qui se démarque cette saison. C’est difficile pour l’ami Mathieu cette année, et ça ne sert à rien de se cacher derrière un drapeau du Québec pour ne pas le voir. Sinon, j’aime beaucoup Ruan, duquel j’attendais beaucoup. Il m’en a donné encore plus. Mais pas tout le temps. Plus de constance serait nécessaire.

Voilà qui termine ce bilan de mi-saison, durant lequel j’aurai répondu à toute sorte de questions, sans aborder directement la question principale : pis, le CF? Eh bien, le CF, ce n’est somme toute pas si mal. C’est difficile, mais ce n’est pas si mal. Il y a place à l’amélioration, mais on sait, pour l’avoir vu, que cette équipe peut et sait faire mieux. Sans directeur technique, ce sera compliqué de se renforcer, mais le vieux cliché n’aura jamais été aussi vrai qu’en cette saison 2024 : les meilleurs renforts à venir sont les joueurs qui reviendront de blessure. Il est là ton mercato, supporter. Ensuite, on verra pour le moyen-long terme. Mais comme je l’ai précédemment expliqué, tout ce groupe, incluant ses entraîneurs, n’aura jamais de meilleur incitatif pour se dépasser que la simple possibilité d’être écarté par le directeur technique qui devrait normalement arriver. C’est le moment d’appuyer sur l’accélérateur.