C’était il y a 25 ans et ce qui s’est passé à Los Angeles en 1994 est resté à Los Angeles… jusqu’à maintenant.
L’histoire, racontée par une personne qui a préféré rester anonyme et qui a été confirmée par deux autres sources, remonte aux séries éliminatoires de l’APSL cette année-là, à la demi-finale en fait, que l’Impact avait remportée en fusillade contre le Salsa de Los Angeles à l’issue d’une prolongation que la ligue avait alors qualifiée de « mini-match ». Cette victoire a permis à l’Impact d’accéder à la grande finale, qui allait avoir lieu deux semaines plus tard à Montréal contre les Foxes du Colorado, et que les hommes de l’entraîneur Valerio Gazzola allaient remporter. L’Impact était donc couronné champion dès sa deuxième année d’existence.
Deux jours avant le match retour de la série contre le Salsa, donc, une bonne dizaine de joueurs de l’Impact se sont retrouvés dans un bar de Los Angeles. Une sortie tout ce qu’il y a plus normal, jusqu’à…
Jusqu’à ce qu’un joueur de l’Impact se mette à danser avec une jeune femme dans le bar un peu trop « comme Kevin Bacon », comme l’a décrit une de nos sources, en faisant allusion au comédien qui s’est fait connaître pour ses danses endiablées, notamment dans le film Footloose.
Il s’avère qu’un homme qui était dans le bar – un client qui était probablement l’ami de cœur de la jeune femme – n’a pas aimé ça et a frappé le joueur de l’Impact en question, en y allant d’un « sucker punch » selon une autre source, pour ensuite fuir vers la sortie.
D’autres personnes l’ont suivi – des joueurs de l’Impact qui ne voulaient pas laisser leur coéquipier se débrouiller seul, mais aussi des amis du client –, et on s’est donc retrouvé à plusieurs dans le stationnement. Il n’y a pas eu de bagarre générale, mais il y a eu des affrontements ici et là.
« Les gars étaient pas mal éparpillés à différents endroits dans le stationnement, si bien qu’on ne voyait pas ce qui se passait avec les autres, a indiqué une de nos sources. Le lendemain, un peu tout le monde se parlait pour essayer de savoir ce qui s’était passé avec un tel et un tel. »
Une source a indiqué avoir vu au moins deux joueurs « se débrouiller plutôt bien » même s’ils étaient inférieurs en nombre, laissant entendre qu’il y avait eu quelques coups d’échangés. Une autre source a dit n’avoir vu que des gens s’engueuler et, tout au plus, se pousser.
« Ce n’était rien de vraiment grave, personne n’a appelé la police », a souligné une des sources.
Même le comportement du joueur de l’Impact à l’origine, quand il s’est mis à danser avec la jeune femme, n’avait rien de déplacé, encore moins d’illégal, nous dit-on.
Comme l’a confirmé une source, l’incident faisait davantage penser à une scène de bagarre au ton burlesque comme celle d’un film à la Smokey and the Bandit avec Burt Reynolds; on était loin de l’atmosphère sordide d’une séquence finale d’un film de Quentin Tarantino.
D’ailleurs, au moment où les choses auraient pu vraiment mal tourner, l’incident s’est clos aussi vite qu’il a commencé.
« Un type a crié qu’il s’en allait chercher son arme à feu, et ç’a été comme le signal de partir. »
Tout le monde a quitté en vitesse… et puis c’est tout. Les joueurs présents n’en ont jamais parlé aux entraîneurs de l’Impact, ni à la direction. Si des joueurs ont subi des petites blessures ce soir-là, elles n’étaient pas assez graves pour qu’ils aient besoin de chercher à les cacher. L’incident n’a pas eu d’incidence fâcheuse sur le match.
« On avait une équipe qui était déjà assez liée pour être prête à se battre les uns pour les autres et là, on l’a fait littéralement », a noté une source.
Bref, c’était là une histoire de jeunesse comme en ont sans doute vécues des milliers de jeunes au fil des ans.
Insidieuse fumée
Gustavo Echevarria n’était pas allé au bar à Los Angeles, ce soir-là, mais il a lui aussi vécu une histoire de bar cette année-là. Qu’il a amèrement regrettée dans son cas, même s’il n’a rien fait de mal.
Celui qui était attaquant réserviste chez l’Impact en 1994, en soutien au duo composé de Jean Harbor et Lloyd Barker, aimerait bien revenir en arrière et effacer la sortie dans un café, puis dans une discothèque qu’il s’est permise… plus de deux semaines avant la tenue de la finale 1994 de l’APSL.
« L’équipe était revenue à Montréal et on avait 16 jours avant la finale, a raconté Echevarria. J’avais été lancé dans la mêlée en prolongation à Los Angeles et j’avais été menaçant, et j’avais même été un de ceux appelés à faire la fusillade. Après neuf mois à ne rien faire d’autre que m’entraîner et rester tranquillement chez moi, j’ai décidé que je pouvais me permettre de profiter de notre journée libre pour aller dans un café de la rue Peel. »
Sauf qu’à l’époque, on avait le droit de fumer dans les établissements du genre.
« J’ai passé deux-trois heures dans le café, puis deux autres heures à la discothèque à l’étage d’en haut, a indiqué Echevarria. Je n’ai rien fait de spécial, je n’ai même pas bu (d’alcool), j’ai juste passé du temps avec des gens que je connaissais.
« Mais tout au long des deux semaines qui ont suivi, jamais je ne me suis bien senti à l’entraînement. Ma préparation a été catastrophique, y compris à l’occasion d’un match amical contre les Ramblers, que j’ai pu disputer parce que Lloyd Barker était blessé. J’avais été en excellente forme toute la saison durant mais là, je n’avais pas de souffle du tout à l’entraînement. Jamais je n’aurais pensé que la fumée secondaire aurait un effet aussi important sur moi.
« Heureusement que Valerio (Gazzola) ne m’a pas fait jouer en finale, parce que j’étais amorphe. Mais c’est un grand regret que j’ai. Qui sait, si je m’étais senti bien et si j’avais bien fait (à l’entraînement), peut-être que j’aurais participé à la finale, ou du moins été utilisé comme substitut en fin de match (en finale), au lieu de Mauro Biello, ce qui aurait représenté quelque chose de très important pour moi. »
Comme quoi il suffit de peu pour dérégler une machine aussi sophistiquée que le corps d’un athlète professionnel.
Divisés sur la question de bonis
Ainsi donc, l’Impact s’est retrouvé en finale de l’APSL en 1994, une finale disputée sur un seul match au Complexe sportif Claude-Robillard à Montréal. L’organisation montréalaise vivait alors sa première opportunité de faire un coup d’éclat à l’extérieur du petit monde du soccer, de gagner de nouveaux partisans à sa cause puisque le hockey était en lock-out et le baseball en grève; l’Impact était donc devenu le seul spectacle sportif en ville. Les grands médias se sont donc tournés (enfin!) vers ce petit club sympathique dont les athlètes ne font pas des millions.
Parlant de « pas des millions », justement, des joueurs de l’Impact se sont rendus compte à un moment donné que personne n’avait pensé, avant le début de la saison 1994, à négocier avec la direction l’octroi de bonis en cas de participation aux séries et à la finale.
À l’approche de la finale, les joueurs en ont discuté entre eux et se sont mis d’accord pour en faire la demande à la direction.
« Le seul aspect où il y avait désaccord, c’était si la direction disait non. Certains voulaient appliquer des moyens de pression en cas de refus, tandis que la plupart des joueurs ont dit qu’on allait demander, oui, mais si la direction refusait, on passait à autre chose et c’est tout, ce n’était pas plus grave que ça », a indiqué un des joueurs qui a participé à la réunion en question avec la direction.
« On a rencontré Camillo Lisio (le grand patron du Groupe Saputo à l’époque) et Pino Asaro (directeur général de l’Impact) et ceux-ci ont dit qu’ils n’étaient pas en mesure de promettre des bonis puisque ça n’avait pas fait l’objet d’une entente au départ.
« Le refus a donc été accepté parce que dans le fond, c’était à nous, les joueurs, d’y penser avant. Mais il y en a quand même eu quelques joueurs qui étaient irrités après le refus de la direction, et il y a eu une discussion assez animée (entre joueurs). Quand même, ça n’a pas eu d’influence sur le match. »
L’Impact a en effet remporté la rencontre et, après le match, les joueurs de l’équipe ont… reçu un boni.
« Ce serait Lino Saputo père qui aurait décidé de lui-même, après la finale, d’en donner en prenant son argent à lui. »
Il faut se rappeler que M. Saputo avait aussi généreusement mis sa collection de voitures antiques à la disposition des joueurs en vue du défilé des champions au centre-ville de Montréal.
Intervention divine?
En cette ère de laïcité au Québec, terminons avec cette anecdote-ci : celle où Mike Moretto, le gérant d’équipement et gérant d’équipe de l’Impact, a fait bénir les maillots de match par un prêtre de sa paroisse avant la finale.
Seuls quelques vétérans avaient été mis au courant. N’empêche qu’il y a eu quelques séquences de jeu, durant la finale remportée 1-0 par le onze montréalais, où on aurait juré que l’Impact avait été aidé par un ange. Comme par exemple, si on se souvient bien, la fois où un joueur des Foxes placé au deuxième poteau a raté la cible au moment où le gardien Pat Harrington avait été pris à contre-pied au milieu de son filet.
Allez (re)voir la finale sur YouTube et jugez-en par vous-même!