L’Impact doit changer

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Les choses sont devenues assez claires lors des derniers matchs. L’Impact de Montréal ne possède pas un effectif suffisant pour pouvoir se battre efficacement dans la Major League Soccer de 2018. Mais au-delà des joueurs, du talent, des tactiques, des impératifs et impondérables du terrain, tout indique qu’il est grand temps de réévaluer la structure qui encadre l’équipe et, ultimement, en dicte le destin.

On connaît le président de l’Impact de Montréal comme un homme passionné, bouillant, au tempérament parfois imprévisible. Comme Joey Saputo le dit lui-même, il est le premier « fan » de l’Impact de Montréal. Cette passion pour le bleu-blanc-noir est sans aucun doute un atout; il vaut mieux compter sur un président dont le sang est de la même couleur que le maillot porté par ses joueurs que sur un président qui ne voit tout ça que comme un investissement, comme à Columbus, par exemple. Toutefois, cette passion peut parfois aveugler.

Après le match contre le Galaxy, le président Saputo s’est entretenu longuement avec Jeremy Filosa à l’antenne du 98.5FM. Faisant preuve de transparence, Saputo s’est exprimé avec toute la fougue et la franchise auxquelles il nous a habitués quand les choses ne se passent pas bien sur le terrain. De ce discours ressort un passage particulièrement intéressant : « Quand on fait des erreurs, il faut admettre qu’on a fait des erreurs. On a sous-estimé où on était et où on voulait s’en aller. On a décidé de faire beaucoup de changements parce qu’on voyait que le caractère n’était pas là l’an passé. On a donné carte blanche à Rémi [Garde] et son équipe. Et je dois dire qu’on a peut-être sous-estimé les autres équipes. On a sous estimé la ligue. »

Disséquons cette citation.

« On a sous-estimé où on était. »
Dans ce cas-ci, il est évident que ce que le président voulait réellement dire, c’est que l’Impact a surestimé sa condition. Il s’est vu plus grand qu’il ne l’était vraiment. En meilleure position. C’était aussi le cas fin 2016, où malgré les lacunes criantes tout au long des deux saisons précédentes et un effectif vieillissant, l’état major a cru que son équipe se situait réellement à quelques pas de la finale de la Coupe MLS. Idem fin 2013, où malgré une incroyable descente aux enfers de plusieurs mois, les personnes concernées ont cru bon ne pas recruter, préférant croire que les déboires de l’équipe étaient uniquement dus à l’incapacité de son entraîneur, Marco Schällibaum.

« On voyait que le caractère n’était pas là l’an passé. »
Si ce problème de caractère est le principal problème ressortant de l’évaluation qui a été faite de l’effectif présent en 2017, pourquoi, alors, la première décision prise dans la série de changements apportées à l’effectif a-t-elle été d’échanger le leader charismatique du groupe, l’homme surnommé « le Général », celui qui n’avait jamais la langue dans sa poche sur le terrain et était toujours le premier à reconnaître les torts de l’équipe et ses propres baisses de rendement? Laurent Ciman porte désormais le brassard de capitaine au LAFC et si certains remettent en question la qualité de son jeu défensif, ce qu’on ne peut ignorer, c’est très précisément son caractère. Le moins que l’on puisse dire, c’est que cette décision est étrange.

« On a donné carte blanche à Rémi [Garde] et son équipe. »
C’est en effet ce qui avait été mentionné lors de l’embauche de l’entraîneur français. Garde aurait la latitude pour bâtir une équipe à son image, l’équipe qu’il désire mettre sur le terrain en MLS. Et donc, on en déduit que c’est lui qui a décidé d’échanger Ciman, et surtout, d’amener Jukka Raitala et Raheem Edwards, deux joueurs, on le suppose, qu’il pistait depuis plusieurs mois. Ou pas. Cette transaction, Rémi Garde l’avait commentée comme un changement qui lui avait été « demandé ». Le 1er mai, l’entraîneur mentionnait même ne pas être seul aux commandes : « Je veux bien être responsable de la manière dont joue l’équipe, avec les joueurs que j’ai sur le terrain. Après, la composition du groupe, et je pense que vous le savez, me dépasse un petit peu. Même si évidemment, je participe activement à ce qu’on peut faire. » Bref, c’est carte blanche… mais est-ce quelqu’un d’autre qui décide? Si on met les morceaux ensemble, la réponse devient évidente.

L’historique de l’Impact de Montréal en matière de recrutement est à l’image du rendement de l’équipe sur le terrain au fil des ans : souvent ordinaire, parfois très mauvais, et de temps en temps, un coup d’éclat qui vient dynamiser la routine. Cette fois encore, des erreurs (pour reprendre les mots du président) ont été commises par les gens qui sont en place depuis plusieurs années.

Si Joey Saputo avait fait un énorme pas dans la bonne direction en attirant Rémi Garde à Montréal, mettant ainsi fin à une série d’expériences spectaculairement ordinaires sur le plan du staff technique, il n’a toutefois pas encore franchi le seuil de la porte du profond remaniement structurel qui s’impose. Le même type de changement qui a été apporté à la tête de l’équipe doit être effectué dans les bureaux. Joey Saputo doit faire en sorte de mieux s’entourer. D’ailleurs, après avoir échoué à plusieurs reprises depuis 2012 dans la sélection du bon entraîneur, quand est venu le temps de sélectionner Rémi Garde, Saputo a choisi de se tourner vers ses contacts extérieurs plutôt que vers ses conseillers montréalais. C’est de ce type de soutien dont Joey Saputo a besoin à Montréal, sur une base permanente.