Georges Laurent fait certainement partie de mon top-100 des personnes que j’ai le plus appréciées au fil de mes 30 années et plus à graviter dans le monde du soccer québécois.
J’ai l’air de me moquer, là, en disant ‘top-100’. Mais quand on évolue depuis près d’un tiers de siècle dans un univers où les personnes de qualité sont innombrables, et ensuite qu’on réduit ça à 100 personnes, finalement ce n’est pas beaucoup et c’est l’équivalent d’un groupe très sélect.
Un groupe qui, à mes yeux, comprend Georges Laurent, que j’ai appris à connaître à mes débuts dans le soccer à la fin des années 1980, quand je m’occupais des relations médias à la Ligue nationale de soccer du Québec. Georges, qui était alors l’entraîneur de l’Univestrie de Sherbrooke, détonnait dans un monde où les émotions régnaient, où chaque peccadille était matière à vociférer contre l’arbitre, contre l’adversaire, contre la ligue. Il était rafraîchissant en raison de son calme, de son flegme, de son ton posé et de son approche réfléchie.
Autant les autres étaient attachants parce qu’ils avaient les défauts de leurs qualités (ou est-ce le contraire?), autant Georges l’était parce qu’il était la version idéale (et idéaliste) de ce que représentait pour moi la passion pour le foot. À l’instar de feu Jacques Gagnon.
Et je n’étais pas le seul à l’apprécier. Ce n’est pas un hasard si la direction de la LNSQ l’avait nommé, avec Paolo Ferrante, co-entraîneur de la sélection de la ligue en vue du match contre le club italien Avellino en 1986.
Sur le gazon, puis sur papier
Tout ça m’amène à vous parler de ce qui suit.
Georges Laurent a écrit l’histoire du foot en Estrie. Deux fois. La première fois, au sens figuré. Et la deuxième fois, au sens propre (ou est-ce le contraire?).
Toujours est-il qu’arrivé au Canada en 1966 en provenance de la France, Laurent est devenu un des pionniers du foot estrien en 1970. C’est ainsi qu’il s’est retrouvé, au fil de ses 35 années de carrière comme entraîneur pendant la période qui s’est étendue de 1970 à 2013, à la tête de 53 équipes. Celles-ci ont remporté un total de 47 titres de champions.
Il a donc écrit l’histoire de cette manière et c’est ce qu’on a reconnu lorsqu’on l’a élu au Temple de la renommée de la Fédération de soccer du Québec, en 1999, puis à celui de l’Estrie en 2007.
Il a écrit l’histoire une deuxième fois quand, il y a trois ans environ, il a décidé de pondre « 300 joueurs, 1000 fois champions » en hommage à ceux qui ont joué sous ses ordres. L’histoire qu’il avait écrite comme entraîneur, il a donc décidé de l’écrire de nouveau, sur papier cette fois. En faisant notamment la description, au fil des 624 pages du bouquin, d’environ 800 matchs, en plus de résumer l’histoire des clubs qu’il a dirigés au fil des ans, comme les Olympiques de Sherbrooke, les Verts de Sherbrooke, les Volontaires du cégep de Sherbrooke, le Vert et Or de l’Université de Sherbrooke ainsi que l’Univestrie, entre autres.
Il a beau avoir gardé toutes les feuilles de match pour ce faire, ce n’est pas évident de s’attaquer à un tel travail de moine. Surtout quand on le fait à compte d’auteur, donc en étant certain d’y perdre quelques milliers de dollars au change malgré les nombreuses copies qui ont déjà été et seront vendues à tous ceux qui ont fait partie des équipes de Laurent.
Mais il voulait coucher le tout sur papier. Pour la postérité. Celle de ses joueurs, surtout. Et aussi, pour le plaisir de voir ses joueurs heureux, heureux de constater que leurs exploits « existent » maintenant noir sur blanc.
« Ce livre, c’est pour mes joueurs. C’est un cadeau que je leur fais », a déclaré Laurent lors d’un entretien téléphonique avec Rétrosoccer.
« Et puis, on m’appelait l’écrivain de la famille, a-t-il indiqué. Quand j’étais adolescent (en France), j’étais au collège à Vitré en Bretagne et j’écrivais à mes grands-parents, qui avaient la garde de mes frères et moi. Dans mes lettres, je leur parlais de la température qu’il faisait, des choses comme ça… et j’étais à 22 km d’eux seulement, donc c’était la même température que chez eux, a raconté Laurent en riant. Mais j’aimais écrire des lettres.
« Et, dans mon enfance, j’ai toujours voulu être journaliste sportif. J’étais un fan des journaux L’Équipe et France-Football. »
C’est cet amour de l’écriture qui, il y a une dizaine d’années, l’a incité à troquer son chapeau d’entraîneur pour celui d’écrivain. Ç’a donné la publication de « Passion Soccer » en 2008, puis de « Ballon, je t’aime », en 2012.
« Quand j’ai eu 70 ans, j’ai eu le goût d’écrire mon histoire de foot au Québec, a indiqué Laurent. Moi, un Français amoureux du foot qui pensait oublier son sport en venant au Canada en 1966.
« Mon deuxième livre, c’était pour ma famille. »
Ceux et celles qui veulent obtenir un des 100 exemplaires (sur 200) de « 300 joueurs, 1000 fois champions » qu’il reste à vendre au prix de 40 $ peuvent le faire au lancement à l’hôtel Times de Sherbrooke, le vendredi 13 avril entre 17h et 19h. Sinon, en communiquant avec Laurent via son compte Facebook.
On peut aussi se procurer une des 80 copies encore disponibles de « Ballon, je t’aime » au coût de 20 $.
Après, Laurent va mettre l’écriture de côté. Marié l’an dernier, il va maintenant prendre le temps de voyager, de profiter de la chaleur du sud, et aussi du calme de sa résidence à Orford.
On terminerait normalement un texte comme celui-ci en parlant de repos du guerrier. Mais comme je l’ai décrit plus haut, Georges Laurent n’était pas un guerrier comme les autres, malgré ses nombreux championnats.
Le repos du gentleman-guerrier, alors?